VisionHub entre dans sa cinquième année : le «bébé» de Fahem Ben Messaoud, entrapreneur dans l’âme, Global Business Development, a bien grandi. «Il s’agit d’une entité indépendante au sein de notre groupe, elle cumule donc les avantages des deux mondes : agilité et ressources. Nous avons travaillé sur l’étude de marché et les prototypes durant trois ans, et la commercialisation a vraiment débuté l’année dernière.»

Avec un rayonnement immédiat, puisqu’on trouve déjà la solution phygitale VisionHub aux Etats-Unis, au Mexique, en Tunisie, au Kenya, aux Philippines, en Australie…

Le service concerne deux publics très différents : d’un côté, une population qui a difficilement accès aux soins, comme au Kenya où l’on compte «250 magasins d’optique pour 50 millions d’habitants». De l’autre, des amateurs de mode et de technologie, séduits par les essayages virtuels et prompts à renouveler leur monture au gré de leur humeur. «Nous apportons une vraie solution phygitale et omnicanale, reprend Fahem Ben Messaoud.

La mission d’Essilor consiste à corriger le mal-voir et VisionHub a choisi pour baseline : “Anywhere, anytime ”. Nous avons vocation à aller nous implanter dans des lieux de vie isolés. Au Kenya, plus de 70% de nos clients achètent des lunettes pour la première fois. Je rappelle qu’ils s’arrêtent dans des stations Total : ce sont donc des automobilistes. Ils conduisent, avec une vue défaillante. Les problèmes de vue sont un mal insidieux, ce n’est pas comme une rage de dents : on ne souffre pas, alors on remet à plus tard. 2,5 milliards de personnes se résignent à mal voir car elles n’ont pas les moyens de s’équiper.»

Les diagnostics possibles dans ces kiosques ne recouvrent bien sûr pas tous les problèmes de vue, mais tout de même «une grande partie».

Aux États-Unis, ou en Afrique du Sud, la situation est différente : le public a envie de tester les montures virtuelles, de partager les photos sur les réseaux sociaux, de disposer de recommandations personnalisées en fonction de sa forme de visage ou de ses activités quotidiennes.

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Deux formules

VisionHub a logiquement été décliné en deux versions : les kiosques standard (sans essayage virtuel) et les kiosques premium. Ces deux formules s’implantent progressivement sur de nouveaux territoires : dans les pharmacies, les grands magasins, et bientôt peut-être dans les zones duty-free des aéroports… «Notre force, c’est de nous fondre dans l’offre de nos clients. Ils ajoutent une nouvelle corde à leur arc, sans efforts. Nous disposons de toute la chaîne d’approvisionnement : les montures, les verres, nous pouvons tout intégrer. Chaque kiosque est un one-stop-shop, un guichet unique.» Les kiosques sont vendus ou loués.

Dans le premier cas, VisionHub prend un pourcentage sur les ventes de lunettes. Dans le second, il s’agit d’un abonnement mensuel. On en trouve même chez les opticiens : «Au départ, ce n’était pas prévu, mais ce sont eux qui sont venus nous trouver pour optimiser leur surface de vente et étendre leur gamme.» «Nous commençons à être copiés, alors nous avons décidé de communiquer plus largement sur notre offre… Nous étions les premiers sur ce segment», poursuit Fahem Ben Messaoud.

Même en bénéficiant de deux sponsors du ComEx, lancer une start-up interne n’a pas été une partie de plaisir, en particulier autour d’une solution susceptible de bousculer l’ordre établi : «Quand vous voulez changer les règles de la distribution, vous créez des incertitudes. Certains estiment que nous allons cannibaliser le marché, nous attirer les foudres de nos clients historiques, les opticiens… Mais nous avons su prouver que VisionHub créait de la valeur, sans en détruire. Et puis, si ce n’est pas nous qui ouvrons ce nouveau marché, tôt ou tard un concurrent le fera.»

En moyenne, un achat en kiosque prend 12 à 15 minutes. Mais les ventes sont, partout, boostées par la présence d’un vendeur : «Le panier moyen augmente de 25 à 30% par rapport à un kiosque laissé en libre-service.»

La donnée recueillie sur ces kiosques, enfin, est à la fois inédite et souvent de meilleure qualité que la donnée produite par les autres canaux de distribution (elle est de première main). Elle appartient par défaut à VisionHub, mais peut faire l’objet de négociations avec les acheteurs des kiosques.

«Nous leur proposons aussi de faire travailler ces datas pour eux. Nous exerçons dans l’industrie optique depuis plus de cent ans, nous sommes capables de détecter des signaux faibles qui vont leur échapper, de segmenter leur clientèle en fonction de notre connaissance du marché.»

Cet exemple est issu de l’ouvrage Digital Synergies 2020, remis à l’occasion de Digital Innovation 2019.

Dans ce livrable, nous présentons près de 30 projets innovants, découpés en deux chapitres : «Améliorer l’expérience client» et «L’écosystème augmenté». Ces initiatives concernent un maximum de secteurs d’activité et font appel à des technologies variées, du Machine Learning au canal vocal, en passant par le Lifi et les hologrammes.